Tendances en matière de sinistres et risques émergents : construction/assurance des chantiers

La nécessité croissante de construire et de reconstruire exerce une pression à la fois sur l’industrie de la construction et sur le gouvernement. Dans le cadre de notre série annuelle de questions et réponses, Jeffrey Cunningham, souscripteur spécialiste, Solutions des entreprises chez Souveraine Assurance, nous fait part de ses réflexions sur les tendances en matière de sinistres et les risques émergents dans le secteur de la construction en 2023, et sur ce que les organisations devraient surveiller en 2024.

Quelles tendances en matière de sinistres ou quels principaux risques avez-vous observés en 2023?

Les changements climatiques et les phénomènes météorologiques extrêmes demeurent au centre des préoccupations des sociétés de construction et des entrepreneurs du monde entier. En fait, les recherches démontrent que les intempéries retardent 45 % des projets de construction dans le monde, ce qui coûte aux maîtres d’œuvre et aux entrepreneurs des milliards de dollars en dépenses supplémentaires et en pertes de revenus chaque année¹. Et cette tendance ne peut que s’accentuer.  

Plus près de nous, les inondations et les incendies de forêt au Canada ont été très préoccupants pour le secteur de l'assurance en 2023, en particulier dans les zones urbaines comme Halifax. Mais nous avons également pris note de plusieurs incendies importants survenus dans des projets de construction de logements en Ontario. Cette situation exercera probablement une pression sur la tarification et la capacité en 2024.

Les entreprises continuent de faire face à des pénuries de main-d’œuvre, à la fois pour leur propre personnel et avec la sous-traitance. L’ensemble du secteur peine à attirer des gens et ceux qui y œuvrent sont submergés de travail. Si l’on considère les travaux de construction, de reconstruction et de rénovation qui s’imposent, en particulier en Nouvelle-Écosse et en Ontario, on constate un véritable afflux de travail et un nombre insuffisant d’entrepreneurs pour l’effectuer.

Quels sont les risques émergents à surveiller en 2024?

Comme tout le monde l’a lu ou le sait d’emblée, le Canada fait face à une pénurie de logements et de plus en plus de pression s’exerce sur le gouvernement fédéral en vue de la construction de nouvelles structures. La Société canadienne d’hypothèques et de logement (SCHL) indique que le Canada aura besoin de 3,5 millions de logements supplémentaires d’ici la fin de la décennie, en plus de ce qui est déjà prévu².

Si l’activité immobilière est une bonne nouvelle pour l’industrie de la construction, les entrepreneurs demeurent tout de même aux prises avec des défis comme la pénurie de main-d’œuvre, l’augmentation des coûts de construction et la hausse des taux d’intérêt. Ils doivent veiller à ce que les valeurs de remplacement soient à jour et qu’ils disposent d’un nombre suffisant de travailleurs qualifiés pour mener à bien les travaux, car les pénuries de main-d’œuvre peuvent avoir une incidence sur les délais et les budgets. Du point de vue du secteur de l’assurance, l’augmentation de l’activité dans les métiers du bâtiment, en plus de l’inflation sur les matériaux de construction, aura probablement in impact en matière de tarification et de capacité.

Pour tout projet, il est important que les clients et les courtiers examinent les spécifications d'assurance et confirment que leur programme d'assurance répond aux exigences – une étape cruciale lorsqu'il s'agit de soumissionner et/ou d'obtenir des projets dans le cadre d'appel d'offres.

Nous continuerons d'assister à une utilisation accrue de matériaux de construction nouveaux et émergents, par exemple les panneaux métalliques isolés et les coffrages en béton isolés, qui nécessiteront une souscription supplémentaire et une analyse de la capacité globale pour les limites du projet. À la lumière de la demande de logements supplémentaires sur une courte période de 10 ans, il est probable que davantage de projets de construction de grande hauteur en bois massif soient proposés. Ces structures peuvent être érigées beaucoup plus rapidement que les bâtiments typiques en béton coulé et la construction est maintenant approuvée jusqu'à 18 étages.

Les entrepreneurs, les courtiers et les partenaires d'assurance continueront à s'efforcer de comprendre les risques associés aux nouveaux matériaux de construction et leurs performances. Des classifications de construction appropriées devront être attribuées à ces risques afin que des taux adéquats puissent être atteints.

Comment les organisations peuvent-elles atténuer ces risques?

La pénurie de main-d’œuvre qualifiée et de logements ne se résoudra pas du jour au lendemain, mais je peux en parler du point de vue du risque du constructeur. Pour La Souveraine, il est important que le client, le courtier et le souscripteur travaillent ensemble sur les projets de construction. Cela signifie qu’il faut fournir tous les renseignements nécessaires à la souscription du risque. Il s’agit généralement d’une proposition, ainsi que de documents clés comme des plans, des calendriers de construction et des rapports géotechniques. Cela signifie aussi que notre équipe de gestion des sinistres doit se rendre sur place, examiner les renseignements techniques et livrer ses rétroactions. Pour les projets plus importants, nous faisons également appel à notre équipe de gestion des sinistres. Il s’agit, en fait, d’une collaboration entre l’assuré, le courtier et nous, afin de garantir au client une protection exhaustive et le respect des pratiques exemplaires en matière de gestion des risques.                     

Sources

¹ Air Force Institute of Technology, Weather-related Construction Delays in a Changing Climate: A Systematic, State-of-the-art Review, 6 mars 2021

² SCHL, Estimation de l’offre de logements dont nous aurons besoin d’ici 2030, 13 septembre 2023